1933: l’affaire des sœurs Papin

Le procès des sœurs Papin

sœurs PapinLe 28 septembre 1933, s’ouvrait un procès qui allait susciter l’attention de la France entière : l’affaire des sœurs Papin. Pour certains, ce fait divers représente l’exploitation des classes laborieuses ; pour d’autres, il marque la volonté d’une justice rapide.

Les faits

L’affaire est une énigme pour les jurés, «Sont-elles folles?», «Une crise de folie meurtrière?» : telles sont les questions que fait naître rapidement le procès très médiatisé de Christine Papin et de sa sœur cadette, Léa. Toutes deux au service de la famille Lancelin depuis 7 ans, elles commettent, le 2 février 1933, deux effroyables crimes: le meurtre de la maîtresse de maison et celui de sa fille âgée de 21 ans. A l’origine du crime, une dispute. A l’origine de la dispute? Un fer à repasser.

Dans la matinée du 2 février 1933, Christine provoque une coupure de courant en mettant en marche le fer à repasser. Une altercation, suivie d’une bagarre, éclate avec ses patronnes: la mère et la fille Lancelin. Christine les frappe à l’aide d’un pichet et d’un marteau, puis apparemment aidée de Léa, les énuclée et taillade leurs jambes et fessiers.

Les deux bonnes sont écrouées pour homicide volontaire. Pendant la période d’instruction, Christine Papin revient sur ses propos : elle serait la seule responsable de ce double meurtre, ce qui relègue Léa au rang de complice.

La piste de l’irresponsabilité écartée

En l’espèce, n’est pas retenu. l’article 122-1 du Code pénal alinéa 1 qui dispose «n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.».

Conduite par trois médecins, l’expertise mentale des deux sœurs, conclut en effet que les accusées ne présentaient aucun signe de délire, de démence ou de trouble psychique au moment des faits. Comment donc justifier ce crime? L’accusation évoque une crise de colère, entérinant l’avis des experts.

La défense, confiée à Maître Germaine Briere, appelle néanmoins à la barre le docteur Logre, médecin de la préfecture de police et aliéniste distingué qui, bien que n’ayant pas rencontré les deux plaignantes, évoque la maladie mentale.

Un procès sur fond de lutte des classes

La médiatisation du procès est telle que, pour la première fois, le maire du Mans fait réglementer par arrêté l’accès au palais de Justice. L’opinion publique est divisée en deux camps : ceux qui veulent la justice à tout prix, et ceux qui crient au « crime de classe ».

Ce procès a « une grande dimension sociale », explique Christophe Belser, historien et écrivain, auteur d’un article sur les sœurs Papin paru dans le magazine Les Grandes Affaires criminelles. « C’est l’exploitant contre l’exploiteur. La notion de domesticité est très forte et on perçoit la dimension symbolique », confie-t-il.

Un procès bâclé

Après 45 semaines d’instruction, il a suffit d’une journée et de 40 minutes de délibération pour que le jury scelle l’avenir des deux sœurs. Temps record pour juger un double meurtre particulièrement sordide. Dans le compte-rendu publié par Le Petit Journal, le journaliste Georges Martin écrit : « Il est clair que l’instruction de ce procès n’a pas été menée par un magistrat exagérément curieux. Le dossier est mince, le nombre des témoins, minime. Nous ne saurons rien ou peu de chose de la vie qu’on menait dans cette maison austère et fermée. »

Christine est condamnée à mort pour le meurtre de sa maîtresse et de sa fille ; Léa Papin, à dix ans de travaux forcés accompagnés de vingt ans d’interdiction de séjour pour meurtre avec collaboration.

Graciée par le Président Albert Lebrun le 22 janvier 1934, la peine de Christine est commuée aux travaux forcés à perpétuité.

Cette affaire, aussi sordide que complexe, a donné lieu à de nombreuses adaptations cinématographiques parmi lesquelles celle du réalisateur Jean-Pierre Denis Les Blessures assassines (2000).

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